Lutter contre l' oubli. Pourquoi ?
Ainsi, je me fais le relais de cette mémoire en vous conseillant de regarder, de revoir et de partager le moyen-métrage documentaire Nuit et Brouillard ( 1956) d'Alain Resnais. Oeuvre indispensable (parmi d'autres, aussi bien cinématographiques que littéraires dont les témoignages de déportés) que j'estime intelligemment construite. Nous ne pouvons et nous ne devons demeurer indifférents à ces images d'archives reliées à la réalité post-concentrationnaire par ces lents travellings latéraux : travellings de nos mémoires convoquant un passé de plus en plus lointain à nos consciences actuelles marquées par ce commentaire final alors que la caméra s'éloigne en travelling arrière, telle une mémoire en fuite, des ruines de chambres à gaz :
« Qui de nous veille de cet étrange observatoire, pour nous avertir de la venue des nouveaux bourreaux ? Ont-ils vraiment un autre visage que le nôtre ? Quelque part parmi nous il reste des kapos chanceux, des chefs récupérés, des dénonciateurs inconnus … Il y a tous ceux qui n’y croyaient pas, ou seulement de temps en temps. Il y a nous qui regardons sincèrement ces ruines comme si le vieux monstre concentrationnaire était mort sous les décombres, qui feignons de reprendre espoir devant cette image qui s'éloigne, comme si on guérissait de la peste concentrationnaire, nous qui feignons de croire que tout cela est d’un seul temps et d’un seul pays, et qui ne pensons pas à regarder autour de nous, et qui n’entendons pas qu’on crie sans fin. » ( extrait du commentaire de Jean Cayrol récité en voix-off par Michel Bouquet)